Hoa Lu fut la capitale du Vietnam indépendant de 968 à 1009, avant d’être abandonné au profit de Thang Long – Hanoi. La visite de ce site présente un intérêt certain, non seulement sur le plan du paysage mais également et surtout sur le plan historique.
Pour comprendre la valeur historique de ce site, il faut remonter un peu dans l’histoire du Vietnam. Après une très longue domination chinoise, en 939, Ngô-Quyên chassa les envahisseurs du pays à la suite de la célèbre victoire sur la rivière de Bach-Dang (voir la rubrique sur Haiphong), et fonda la première dynastie nationale dont la capitale fut Co Loa, qui se trouve actuellement en banlieu de Hanoi.
En 963, à la mort du second fils de Ngô-Quyên (décédé en 944), le royaume tomba dans l’anarchie et fut partagé entre douze seigneurs. Mais ces derniers furent éliminés en quelques années par Dinh Bo Linh, le gouverneur de l’actuelle province de HaTinh, l’homme aux « dix mille victoires » qui, après un quart de siècle d’anarchie politique, parvint à faire taire les grands féodaux. Dinh Bo Linh se proclama empeureur en 968 sous le nom de Dinh Tien Hoang (premier roi des Dinh – ce nom est actuellement donné à l’une des rues entourant le lac de l’épée restituée à Hanoi) et donna à ses États le nom de Dai Co Viet (Le grand Viet glorieux). Pour s’éloigner de la menace du Nord, le nouveau monarque avait fixé la capitale très loin dans le bas du delta, à Hoa Lu, pour des raisons à la fois stratégique (Hoa Lu est entourée à l’Ouest de hautes montagnes et avait comme base arrière tout le bas delta et ses prolongements) et politique (en s’installant à Hoa Lu, le nouveau souverain s’adossait à la région qui l’avait porté sur le trône). Après l’assasinat de Dinh Bo Linh et de son fils en 979, le pouvoir passa aux mains du général Le Hoan, puis à ses fils qui régnèrent à Hoa Lu jusqu’en 1010 sous le nom des Le antérieurs.
De nos jours, dans le cadre magnifique des rizières au pied des montagnes, cadre qui devrait ne pas changer depuis les Dinh, il ne reste plus les grands palais et monuments royaux. Les seuls vestiges importants sont deux temples, l’un dédié aux Dinh, l’autre aux Le antérieurs.
Le premier temple, le plus éloigné, est dédié à Dinh Bo Linh. Au XIème siècle, lors de sa construction, le temple était orienté vers le Nord ; ce n’est qu’en 1696, qu’il fût reconstruit regardant vers l’Est. Après avoir passé deux arches triomphales, on se trouve devant le « lit du Dragon », piédestral du trône royal en pierre, où avaient lieu les sacrifices lors des grandes fêtes.
A l’intérieur du temple, la statue de ce premier roi viet ne date que du XVIIe siècle. Elle est en bronze doré. De chaque côté se trouvent les statues de ses trois fils, ce qui nous oblige à évoquer le sort qui s’acharna sur cette famille.
En 979, Dinh Bo Linh fût empoisonné en même temps que ses deux fils ainés par un mandarin. Jadis, à l’anniversaire du meurtre, on plaçait devant le temple, la statue de l’assassin et on la flagellait publiquement. Cette coutume fût supprimée par Gia Long qui fit brûler la statue du meurtrier.
Dinh Bo Linh laissait une veuve et un enfant de 6 ans pour prince héritier. On n’a toujours pas fini de jaser dans les chaumières sur les vraies raisons qui poussèrent la veuve à céder le trône au général en chef et de l’épouser par la suite. Les mauvaises langues ne se privèrent pas d’accuser la veuve de complot, tandis que les livres scolaires vantent les mérites de cette femme qui a su sacrifier l’amour familial au profit de l’amour pour la patrie.
Le général Le Hoan monta sur le trône. C’est lui qui allait fonder la première dynastie des Le, et c’est encore lui qui saura repousser victorieusement les Song, puis s’emparer du pays Cham en 982.
C’est donc à Le Hoan qu’est consacré le deuxième temple qui se trouve à 500 mètre du premier.
Comme le précédent il respire la paix, mais il a comme particularité d’avoir un petit sanctuaire dédié à Confucius et un joli portique décoré de statues polychromes. Vous serez peut-être surpris par le mauvais état de ce temple par rapport au précédent, bien que plus récent. Cela s’explique simplement par le fait que le temple des Dinh est consacré au fondateur de la patrie ; il a donc été restauré plusieurs fois. Le second, beaucoup moins, mais conserve en même temps une plus grande authenticité. A l’intérieur, trônent les statues de Le Hoan, son fils et de la reine Duong Van Nga.